Après #BalanceTonPorc, #MeToo et plus récemment l’interview d’Adèle Haenel pour Mediapart, la libération de la parole des femmes mais surtout l’écoute de ce qu’elles ont à dire sur les sévices qu’elles subissent ou ont subi a une résonance dans la société. Il est désormais entendu de tous.tes que la relation hommes / femmes a de nombreux socles toxiques qui incommodent, discriminent et violentent les femmes. Cependant, les effets réels de moments révolutionnaires s’évaluent sur un temps long et aujourd’hui on compte encore plus de 114 féminicides depuis le début de l’année 2019, comme l’ont rappelé de manière superbement poignante les FEMEN lors de leur action “Plus écoutées mortes que vivantes”. On est en droit de se demander si la relation hétérosexuelle cis-genrée qui semble si problématique peut encore être compatible avec un engagement féministe, pour qui souhaite rester cohérente avec ses valeurs ?
Le féminisme post #MeToo questionne les fondements du mécanisme des relations hétérosexuelles
Dénoncer le patriarcat et ses effets, c’est mettre en branle toute une structure organisée de société depuis des millénaires. C’est remettre en cause la propre éducation que nous avons reçue, nos codes culturels, des valeurs qui nous ont été inculquées dès la petite enfance, des imaginaires, jusqu’à la musique qu’on écoute, et surtout la domination institutionnelle dont bénéficient les hommes.
En disant stop aux situations de violence et abus que subissent les femmes au quotidien dans l’espace privé et public, nous indiquons aux hommes que les clichés de la masculinité virile avec lesquels ils se sont partiellement ou totalement construits sont des virus dans l’ordinateur de la société et que nous ne souhaitons plus en être infectées.
Nous remettons en cause leur domination, leur sentiment de puissance, leur regard sur les femmes et jusqu’à leur propre sexualité. C’est un travail de longue haleine qui demande une remise en cause en profondeur pour la gent masculine, mais également la féminine.

Dans le jeu de l’amour non hasardeux des relations hétérosexuelles, toute la séduction est basée sur le modèle du chasseur qui saisit sa proie, de l’homme qui part à la conquête de la femme, du dominant qui attrape la personne dominée. Un jeu auquel participe amplement les femmes, car rappelons tout de même que toutes les relations hétérosexuelles ne naissent pas sans consentement, et encore heureux !
Quand nous affirmons donc que nous ne souhaitons plus être soumises aux diktats sexistes, que nous voulons être maîtresses de notre désir, que nous ne contenterons plus d’être des proies, mais pouvons aussi être des êtres dominants, c’est toute une vision de la relation hétéro que nous questionnons.
Dernièrement, un article de Slate concluait qu’entre le couple et ses convictions, une féministe hétéro aurait du mal à avoir les deux, car la réalité du ménage ne concorde pas encore avec les idéaux féministes. Le média partage également une donnée d’enquête de l’Insee en 2018, qui indique que trois quarts des tâches domestiques sont encore effectuées par les femmes dans un couple. Concrètement, notre combat féministe est en train de demander aux hommes – donc aux dominants sociaux – de perdre des privilèges, de partager le pouvoir, d’être empathiques et donc de sortir de leur position confortable. Osons le dire, cela ne sera possible massivement, que s’ils y voient leur intérêt.
Rappelons-nous que nous vivons dans un monde capitaliste, qui nous a biberonné à l’idée qu’il faut s’accomplir individuellement, qu’il faut gagner plus que les autres, en avoir plus que les autres, pour réussir et être le plus puissant. Dans un monde avec un tel système de valeurs, il n’est pas aisé d’expliquer qu’être celui qui domine et écrase une partie de la société est un concept has-been. Pour cela, il va falloir le prouver. C’est là que les femmes hétérosexuelles féministes ont un travail important de cohérence entre les luttes revendiquées et les actes menés.
Ne plus aimer les hommes non féministes pour vivre en accord total avec ses valeurs
Etre féministe et vouloir une société d’hommes féministes, cela implique une responsabilité chez l’homme comme la femme, qui doivent tous deux s’interroger sur leurs schémas relationnels. Du côté de la femme, on ne peut se revendiquer féministe et engagée, mais continuer de valoriser plus facilement des profils d’hommes qui vont à l’encontre même des principes qu’on défend. Il existe déjà des hommes respectueux, attentifs, attentionnés, aimants et peu voire pas toxiques. Encore faut-il réellement s’intéresser à eux également. Se laisser attirer par un homme qui prend le temps de nous séduire et s’intéresse vraiment à nous, prend le temps de nous connaître, de nous écouter et même de développer une amitié avec nous, plutôt qu’à celui qui nous fait du rentre-dedans en soirée et par lequel on se laisse prendre parce qu’il est “beau gosse” et que ça flatte avant tout notre ego. Car le combat féministe se joue également dans cette cour-là désormais : ne plus cautionner nous-mêmes la masculinité toxique, en ne lui permettant plus de gagner notre désir. Si un homme sexiste continue d’arriver à séduire de nombreuses femmes, pourquoi se mettrait-il à changer ? Tant que les vieilles recettes fonctionnent, il n’y a pas de raison de les modifier. Nos paroles n’auront réellement un poids que si nos actes prouvent également notre désaccord.

Les relations se construisent ensemble. Dans la sexualité et en amour, c’est une composition à deux, où chacun des membres du couple joue ses propres notes. Vouloir des hommes plus féministes ou moins sexistes, c’est aussi s’engager à tourner le dos à ceux qui ne le seraient pas.
On ne peut scander “à bas le machisme” et continuer de désirer ardemment les hommes qui en ont les attributs. Si le féminisme souhaite qu’un nouveau rapport de force s’installe dans la société, il faut que nous acceptions aussi d’œuvrer pour la déconstruction de nos propres désirs.
“Pourquoi est-ce que je tombe toujours amoureuse des connards ?”. Cette phrase classique des femmes, doit pouvoir ne plus exister dans la bouche d’une féministe. Facile à dire et difficile à faire, me direz-vous. Ça arrive aussi de croire qu’on est tombées sur un “bon mec” et de finir par réaliser qu’il agit comme un porc et de finir par souffrir. Oui, mais nous savons toutes qu’une femme peut avoir tendance à toujours se sentir attirée par le même type de mecs, en sachant d’avance que ça ne peut justement pas marcher avec ce type de mecs, et qu’il a justement le profil typique de celui qui fera souffrir. Combien d’entre nous ont également déjà entendu des mecs se présenter comme féministes ou soutenant la question féministe et continuer par ailleurs d’avoir une attitude ou des propos qui montrent tout le contraire ? Un exemple dans la pop culture, c’est le mari de Kate Foster dans la série Netflix Workin Moms, Nathan Foster, qui soutient sa femme dans tout ce qu’elle fait globalement, partage les tâches ménagères et semble assez féministe au début, mais qui montre des signes de jalousie et d’énervement, quand elle a une promotion au boulot qui lui demande un déplacement et donc qu’il doit garder seul leur enfant, sachant qu’elle gagnera désormais plus que lui. Il s’énerve également parce que lui ce qu’il veut c’est qu’elle lui donne un deuxième enfant. Il la renvoie donc à son rôle avant tout de mère, la fait douter d’être une bonne mère et penser qu’elle est potentiellement monstrueuse de penser d’abord à son ascension professionnelle. Pour l’homme féministe, on repassera.
C’est là que se pose la question de la possibilité réelle d’arriver encore à se projeter dans une relation avec un homme, quand on est une féministe hétérosexuelle. En effet, si un changement réel de paradigme ne s’opère pas chez les hommes, que le travail profond de conscientisation et remise en cause de cette domination machiste est trop difficile pour eux dans leur majorité (ou trop peu avantageuse pour être vue comme une nécessité), il peut devenir inévitable que les femmes féministes prennent un tournant radical et leur tournent totalement le dos, dans un élan d’instinct de survie psychique, et pour coller véritablement à leurs convictions.
Si la zone de confort dans laquelle se situent les hommes, qui fait du mal à de nombreuses femmes, reste telle quelle, et qu’en parallèle les femmes féministes ont de plus en plus de mal à supporter cet état de fait, alors il va devenir impossible d’allier féminisme et relation hétérosexuelle. Il ne serait pas étonnant alors que les femmes se tournent de plus en plus vers des amours féminines. Ce qui serait peut-être le stade de conscience le plus élevé, une situation plus saine pour chacune et un moyen d’être pleinement en accord avec ses positions féministes. Et alors, seulement là quand les hommes verront que le machisme n’a plus aucun intérêt de séduction, ni d’intérêt relationnel tout court, seulement là prendront-ils peut-être massivement la mesure de la situation et admettront qu’ils ont plus à perdre qu’à gagner, à rester dans l’ancien système de pensée.
Les chiennes ne font pas les chattes. J'oscille entre les deux.
Traduction: “Quand l’homme se montre rationnel, la femme se tourne vers l’émotionel féminin”
Merci Tatiana.
Votre réponse, longue et argumentée, me conforte et m’incite à persévérer dans mon idée que si nous ne sommes pas semblables, quelle horreur ! nous pouvons très bien nous entendre.
Encore faut-il que nous parlions le même langage.
Et votre blog nous y incite vraiment.
« Soutenir sans réserve », ce serait démissionner de notre capacité de réflexion (et je ne parle pas que des hommes). M’intéressant au combat féministe depuis toujours (j’ai été éduqué dans ce milieu-là – ce qui n’empêchaient pas mes parents de reproduire de nombreux schémas sexistes et – j’ose le mot – patriarcaux), j’ai pu remarquer qu’il y avait autant de féminismes que de féministes, de même qu’être « de gauche » pouvait se revendiquer avec 1000 nuances et toujours quelqu’un plus radical pour vous dire que, non, vous n’êtes pas de gauche (resp. féministe) si vous ne pensez pas ceci ou ne faites pas cela.
Mon féminisme (et mon gauchisme) ont donc des limites, et par exemple, je considère que le féminisme se perd quand il se colore d’une dose de misandrie (j’ai lu parfois qu’il se justifiait comme un retour de bâton de toute la misogynie accumulée – mais je ne porte que ma culpabilité propre et pas celle de mes ancêtres colons, esclavagistes, machistes, aristocrates, bonapartistes ou tout ce qu’on voudra).
J’ai cru noter dans cette série d’articles (j’ai lu l’article de Slate, entre autre) et dans ce mouvement (?) ou réflexion « sortir de l’hétérosexualité » que le discours devenait de plus en plus absolu et très théorique, comme si regarder le monde avec ces nouvelles lunettes empêchait d’en voir un partie, et surtout nous déparait de toute spontanéité (on pourra questionner ce mot) dans les rapports humains.
Tu le dis, d’ailleurs, rapidement, en indiquant que tu vis avec un homme féministe : son féminisme n’a-t-il pas aussi ses limites ? qu’y a-t-il à déconstruire encore, dans sa vision ou dans la tienne ? n’est-il pas parfois tenté (comme le premier commentateur « chaines ») de prononcer la terrible phrase « not all men » qui lui vaudra immédiatement une belle levée de boucliers ?!
À trop théoriser le combat féministe, à rechercher un absolu, je crains qu’on s’écarte finalement de l’objectif : conquérir l’égalité, par petits ou par grands pas. #MeToo a pu faire croire que le monde venait de changer brutalement. Non, c’est une prise de conscience salutaire, mais dont la progression dans toutes les strates de la société sera lente, se fera sur plusieurs générations. Et il restera toujours des machistes comme – hélas – des racistes ou des antisémites.
Resserrons nos combats au lieu de diluer l’énergie à les ouvrir à l’infini.
Arrêtons (tous et toutes), par exemple, de protéger les prédateurs : https://www.liberation.fr/france/2019/11/07/au-ministere-de-la-culture-les-entretiens-pervers-d-un-haut-fonctionnaire_1762196
Traquons le sexisme au quotidien, dans notre entourage, mais n’oublions pas de vivre ensemble !
Je fais partie de la majorité silencieuse, qui suit ce site avec plaisir depuis longtemps sans jamais poster un commentaire. Désolé de le faire justement pour le seul article qui m’a dérangé, après des dizaines d’autres que j’ai trouvés pertinents, intéressants, positifs, intelligents…
Je suis un homme, profondément féministe, essayant de l’appliquer du mieux possible dans mon quotidien (lutte contre les clichés parfois profondément ancrés, partage équitable des taches domestiques, sexualité basée sur le partage, l’écoute, le respect, etc.). J’ai donc pris le titre de cet article, ainsi que son contenu, comme une généralisation très injuste.Si votre propos est de dire “peut-on être féministe et aimer des hommes non-féministes” (ou machos, ou misogynes, ou ce que vous voulez), oui, la question est intéressante. Sauf que durant presque tout l’article, vous vous contentez du mot “hommes”.
J’ai beau avoir envie de croire que vous ne voulez pas dire que tous les hommes sont anti-féministes et accrochés à leurs privilèges, plusieurs passages m’en empêchent. Vous dites bien “Vouloir des hommes plus féministes ou moins sexistes, c’est aussi s’engager à tourner le dos à ceux qui ne le seraient pas. ” Mais dans le même temps, (et outre le titre très général sur “les hommes”), vous écrivez qu’il “va devenir impossible d’allier féminisme et relation hétérosexuelle” ou encore que “Nous [les femmes je suppose] remettons en cause leur domination [de tous les hommes donc, sans distinction], leur sentiment de puissance, leur regard sur les femmes et jusqu’à leur propre sexualité”.
Pour moi et pour beaucoup d’autres hommes je pense, la séduction n’est pas “basée sur le modèle du chasseur qui saisit sa proie, de l’homme qui part à la conquête de la femme”. En faisant ainsi une généralisation sans nuances “homme=macho anti-féministe”, vous insultez ceux qui essayent comme vous de rendre les rapports hommes-femmes plus sains et égalitaires, vous les mettez dans le même panier que ceux qu’ils combattent à vos côtés.
Je retrouve entre les lignes une vision du féminisme que je déteste, qui voudrait voir tout ceci comme une lutte des femmes contre les hommes. Qui voit les choses comme un combat “contre”, et non une évolution “avec”. Oui, il y a surement beaucoup plus de travail à faire du côté des hommes, mais on sait aussi que de nombreuses femmes continuent à tenir des discours d’un autre âge. S’agit-il donc vraiment d’un problème “hommes contre femmes” ? Pour faire un autre parallèle, ne faudrait-il parler de racisme qu’entre personnes racisées ?
Bref, venant d’un site prônant la tolérance, cet article m’a vraiment étonné, comme d’ailleurs en passant le nouveau sous-titre du site ; “média féministe”. Un peu réducteur je trouve… Etes-vous vraiment seulement un média féministe ? Ou plutôt un média parlant de sexualité positive, de lutte contre les clichés toxiques (qu’ils touchent les femmes, mais aussi les hommes, les minorités, les autres types de sexualités…), de respect dans les rapports hommes-femmes… ?
Votre travail est crucial, faites attention de n’exclure personne de votre combat.
PS : désolé encore de ne commenter que pour exprimer mon mécontentement, mais un autre passage de l’article m’a interpellé, pour d’autres raisons. “Il ne serait pas étonnant alors que les femmes se tournent de plus en plus vers des amours féminines.” Euh… C’est à dire que l’orientation sexuelle serait décidée consciemment, selon des critères éthiques réfléchis ? L’homosexualité serait un choix ? Terrain dangereux…
Bonjour,
Tout d’abord, merci de commenter et j’accepte vos excuses, mais je trouve effectivement dommage de ne commenter que lorsqu’il y a mécontentement… 😉
Ensuite, je comprends votre colère face à la généralisation du mot hommes, mais vous remarquerez néanmoins que j’indique au sein de l’article que les femmes hétéros féministes (et je devrais préciser “cisgenre”, c’est un défaut de facilité de langage de ma part) doivent justement pour aller au bout de leur engagement ne plus cautionner les attitudes des mecs qui ont les attributs évidents machistes, ce qui est une catégorisation évidente ici.
Je ne nie pas qu’il y a des hommes féministes, engagés ou non, qui vivent en tout cas selon des principes respectueux envers les femmes, qui n’ont jamais vu les femmes comme des proies etc., pour preuve mon compagnon a toujours été et est comme ça, depuis la petite enfance, ce qui lui a d’ailleurs beaucoup valu le mépris des autres hommes, donc je sais parfaitement que vous existez quelque part, et que globalement les lecteurs de Desculottées sont plutôt de ce côté-là, sinon ils ne nous liraient pas ou moins assidûment. Et Desculottées a toujours été inclusif des hommes hc (hétéro-cis) et d’ailleurs de tous.tes, c’est un choix volontaire depuis le tout début et qui ne changera pas, car c’est ensemble qu’on construit un monde meilleur, une sexualité plus satisfaisante et des relations saines et profitables à tous.tes.
Je suis ravie justement que cet article vous révolte, car prendre le temps d’écrire pour dire votre colère de vous sentir mis dans un panier auquel vous n’appartenez pas, c’est quelque part une preuve d’un réel désir d’exprimer votre soutien et votre engagement sur ces sujets. J’ai presque envie de dire, c’est ça qu’on attend des hommes comme vous, qu’il y ait un sentiment de révolte, une réaction, un partage et pas une passivité, sortir justement de cette posture de “majorité silencieuse” dont vous parlez. On ne veut pas de votre silence, mais justement vous entendre, vous voir, vous voir agir aussi à nos côtés.
Je n’exclus pas dans cet article, contrairement aux apparences, j’invite tout le monde à vraiment cesser de juste parler et se donner bonne conscience et vraiment agir réellement au quotidien, aussi bien les femmes hc que les hommes hc. Cette généralisation est parfaitement volontaire, car trop de malveillance se cache derrière la non-généralisation. A force de vouloir mettre l’emphase sur les exceptions, de prendre la précaution de les mentionner, tout le monde se sent être l’exception. Hors non, il n’y a pas des Weinstein, des Ruggia, des Tarik Ramadan, et en face des hommes normaux. Nous faisons tous.tes partie d’un système-monde dominé par un modèle patriarcal, qui a ancré des visions et des réflexes chez TOUT LE MONDE. Ce n’est par ailleurs pas le féminisme qui crée une lutte femmes contre hommes, c’est la société patriarcale qui met les hommes contre les femmes et vice-versa en prétendant qu’il y a unité. Il y a unité dans un rapport biaisé de domination, malheureusement, et c’est là qu’on a un travail de réinvention à accomplir, qui va passer par des phases dures.
Je pense très sincèrement que ni moi, ni vous ne sommes parfaits dans nos rapports au quotidien. J’ai moi-même réalisé que j’avais été soumise à des injonctions parfois sans m’en rendre compte, sans pour autant que cela soit une souffrance, et sûrement que vous aussi peut-être vous asseyez-vous jambes super écartées dans un bus sans le réaliser, ou coupez-vous plus souvent la parole à une femme au boulot, ou je ne sais quoi d’autre… j’essaie juste ici d’appuyer le fait que ce n’est pas une “majorité silencieuse” qui va faire que les rapports entrent massivement justement dans un esprit positif, c’est une majorité active dans sa déconstruction générale. Les hommes – même féministes – ne peuvent se dédouaner d’une responsabilité générale, et s’en contenter en se disant “moi ça va, je suis féministe” et ne pas réinterroger la structure groupe et les femmes ne peuvent dire “je ne veux plus des connards machos” et ne pas interroger leur rôle aussi dans leur position de soumission. C’est pour ça qu’il y a généralité. C’est regarder l’ensemble avant le particulier, sinon on ne peut démonter le système. Le titre de l’article est éminemment provocateur pour susciter le débat, même s’il fait totalement sens dans le propos tenu.
Ensuite, c’est un média féministe dédié à la sexualité positive. La démarche est féministe, dans un sens de respect de tous.tes, et de libération de la sexualité des femmes et des hommes et de tous genres, dans une vision humaniste. C’est féministe aussi car nous ne sommes que des femmes à écrire, pas forcément hétéros, mais toutes cis, pour le moment, et donc que de ce point de vue c’est éminemment féministe, avec une vraie volonté de dire que des femmes qui assument leur sexualité et des hommes qui le comprennent et ne le jugent pas, c’est profitable pour tous.tes.
Enfin, pour ce qui est des amours féminines… Il n’est dit nulle part que l’homosexualité est nécessairement un choix, mais réduire l’homosexualité ou l’hétérosexualité à un attribut de naissance sans possibilité de fluctuation est une bien belle réduction aussi. Tout dans notre sexualité peut évoluer, aussi bien les pratiques solo qu’à plusieurs, nos goûts et l’orientation peut aussi être soumise à ces évolutions, ce n’est ni obligatoire ni la preuve d’un choix. Exemple : ce n’est pas parce que je suis hétéro pendant 20 ans, puis bi pendant 10 ans, puis homo à la fin de ma vie, que j’ai choisi à chaque fois. Au contraire, j’ai juste écouté une évolution de mon orientation, qui s’est présentée ainsi. Idem si je suis toute ma vie hétéro ou toute ma vie homo. Ce qui est dit ici, est tout simplement que si le rapport hétérosexuel-cis n’évolue pas dans sa globalité, qu’il continue d’apporter autant de souffrances et d’insatisfactions aux femmes hc, et qu’il continue d’y avoir une incompréhension des hommes hc (au global) et un refus de vraiment remettre en cause des procédés de domination hérités et qui peuvent leur paraître normaux (je ne parle pas juste de siffler dans la rue ou toucher des culs, mais déjà juste par exemple d’appeler une collègue “miss” en l’infantilisant, ou de considérer comme normal d’être toujours celui qui doit déclencher l’acte sexuel), alors là oui, je pense qu’à force de prise de conscience, les femmes pourraient en plus grand nombre trouver plus intéressants, plus simples, plus sains, et plus positifs des relations avec d’autres femmes, car ces jeux de pouvoir y sont moins présents. Ce ne sera pas un choix justement, ce sera peut-être juste un penchant naturel, car elles y verront plus leur intérêt.
Je n’exclus justement personne du combat et tente de mettre tout le monde face à ses responsabilités et de créer l’alerte sur le fait que les relations hétérosexuelles doivent réellement évoluer en profondeur, et qu’il ne va plus suffire de se dire “féministe” (hommes comme femmes), pour assurer une sexualité et des relations positives. Il va falloir se battre non pas les uns contre les autres, mais justement ensemble en acceptant de travailler sur nos différences. 😉
Et merci encore de lire Desculottées ! 🙂
Merci pour votre réponse. Je ne vais pas répondre point par point, mais je partage la plupart de vos arguments (en particulier qu’il est dangereux de penser que le problème ne provient que de quelques individus toxiques, et ne serait pas global, ou encore que malgré toutes les bonnes volontés, nous reproduisons tous – moi évidemment y compris ! – des comportements néfastes).
Ce sont justement ces précisions qui, à mon sens, manquent à cet article pour en faire une base à la réflexion et non (c’est en tout cas comme ça que je l’ai pris) un manifeste simpliste anti-hommes.
Pour m’excuser de ne commenter que pour râler, je redis qu’il ne s’agit que d’un article sur des dizaines pour lesquels je félicite sincèrement toute l’équipe. Peut-être n’en avez-vous pas forcément conscience en écrivant, mais un public masculin (je doute être le seul) lit aussi avec beaucoup d’intérêt les articles qui semblent viser avant tout les lectrices, qu’il s’agisse de vaginisme, de flux instinctif ou d’abandon du soutien-gorge ! Peut-être une partie de la solution est-elle aussi là, dans l’envie de mieux comprendre l’autre ? Continuez, en tout cas !
Je suis ravie qu’on ait réussi à se comprendre et merci pour votre soutien à Desculottées, vraiment. Je sais que vous êtes nombreux à lire, pour être plus précise l’audience du site est composée à 50 % de personnes de sexe masculin selon mes statistiques et ceci est une grande fierté, car c’était la volonté du site, donc ravie que le message passe ! Je reste persuadée que nous devons se comprendre mutuellement, car nous partageons cette Terre ensemble, et qu’il vaut donc mieux être en paix ensemble, qu’en guerre, mais au vu des structures oppressives millénaires présentes dans nos relations, y a du boulot pour assainir tout ça, mais si on le veut, ça arrivera 😉
Et que sont censés faire les hommes, hétéro et féministes ?
Suivre le mouvement, se démarquer ou soutenir sans réserve ?
J’en suis et j’assume totalement.
Bonjour Michel,
Ca fait plaisir de lire que “vous en êtes totalement” et merci de venir l’écrire sur le site ! 😉
Oui, il faut suivre le mouvement, se démarquer et soutenir sans réserve, mais surtout agir au quotidien. Etre un homme féministe (et j’espère qu’un jour on dira juste “être un homme”), c’est déjà réinterroger ses propres actions passées qui n’étaient pas forcément positives envers les femmes, et être capable de voir si aujourd’hui certains réflexes subsistent. Car je suis persuadée qu’on peut se penser féministe et continuer d’avoir des réflexes sexistes malgré soi, et s’en rendre compte et accepter d’ajuster cela, c’est cela qu’il faut faire. A titre d’exemples : c’est prendre sa part de tâches ménagères naturellement sans demander à sa partenaire “est-ce que tu veux que je t’aide ?”, c’est soutenir sa compagne dans ses réalisations et ne pas la rabaisser ou ne pas l’encourager par jalousie et peur qu’elle gagne plus que vous, c’est ne pas voir une nana comme une “salope” sous prétexte qu’elle aime coucher avec des mecs ou coucher le premier soir, c’est ne pas laisser d’autres mecs faire des blagues lourdes sur le cul ou la tenue d’une collègue au bureau sans rien dire, c’est ne pas harceler, culpabiliser ou menacer une ex qui aurait décidé de vous quitter car ce n’est pas votre possession, c’est faire l’amour avec une femme en s’impliquant vraiment pour que le plaisir soit à deux et pas juste pour vous, ne pas prendre toute la place sur un siège etc Bref, il y a tant et tant d’habitudes sexistes dans notre quotidien que la liste peut être très longue, mais je crois que ce qu’il faut retenir, c’est qu’il ne faut pas juste être féministe en paroles, mais vraiment aussi en actes.
Et sachez que les femmes aussi ont du boulot pour être féministes, comme dit dans l’article, vous n’avez pas d’ailleurs 100% de la charge mentale à ce sujet, même si vous en avez la majorité. Car face à ces nouveaux hommes, qui je l’espère seront de plus en plus nombreux, les féministes ont aussi leur rôle à jouer et doivent exprimer leurs besoins et désaccords avec leurs partenaires, d’encourager ces changements et de désirer les hommes féministes plus que les hommes machistes pour être vraiment cohérentes avec les revendications.
En gros, on a tous.tes du boulot, mais c’est pour le bien de tout le monde et des relations plus saines ! 🙂